1
0
contenu/critiques/series/fallout/index.md

8.0 KiB
Raw Blame History

Introduction

Il y a tellement de choses qui me parlent dans lunivers de Fallout… Lesthétique rétrofuturiste des années 1960 américaines, la période post-apocalypse nucléaire, les bunkers, la survie en milieu hostile, tout y est.

Paradoxalement, alors que je nai pas passé beaucoup de temps sur les jeux, jattends cette série depuis que je sais quelle allait sortir, et jadore tout ce que jy vois. Amazon nous gratifie dune excellente adaptation dune saga de jeux-vidéo, et je crois que cétait assez rare pour être souligné.

Personnages

La distribution est excellente. Il y a des têtes connues et dautres moins. Il y en a même que lon nattendait pas là, et que lon regrette de voir partir un peu trop rapidement !

Je pense en particulier à Michael Emerson que j'ai adoré dans [LOST](/critiques/series/lost/)...

Ella Purnell incarne Lucy MacLean, dont on suit la quête pour retrouver son père (interprété par Kyle MacLachlan, autre acteur que jaime beaucoup). Elle sera rejointe, dabord par intermittence, par Maximus de la Confrérie de lAcier (Aaron Moten), et leur chemin croisera celui de la Goule, à qui Walton Goggins — habitué des westerns — prête ses traits.

Il ny a que du beau monde, et les guests ne font pas exception.

Scénario

Le pitch est assez classique (et cest vrai aussi pour les jeux-vidéo puisque la structure de la série est calquée dessus). Fallout présente une uchronie dans laquelle la Guerre Froide a dégénéré.

Je tiens à souligner à quel point lintroduction produite par Amazon pour la série est magistrale. Son écriture est tout simplement brillante, ”éclatante” oserais-je dire.

Le paisible d'une scène d'anniversaire d'enfants de quartiers aisés, brusquement interrompu par un silence de mort s'abattant au même instant que la première bombe sur la ville voisine que la fête surplombe. Vient alors le souffle de l'explosion, brisant le silence et le verre, puis les cris, les débandades, la fuite. Un homme, un *cow-boy* venu animer la fête, prend sa fille sur son cheval et tente de fuir la débacle. Tandis qu'ils contournent la colline, la terreur va *crescendo* : une deuxième bombe s'abat, puis une troisième, une quatrième, comme si une seule n'était pas assez terrible. Les champignons atomiques s'élèvent partout, le monde touche à sa fin. Ainsi que la scène.

Terrifiant, magistral.

On sent que Jonathan Nolan va nous promener et nous malmener pendant le voyage initiatique de lhéroïne, exactement comme dans les jeux. On ne sait jamais ce qui nous attend, ni comment les évènements vont senchaîner. Pourtant, la cohérence du scénario est exemplaire, et ne donne nullement limpression dune série qui elle, ne sait pas où elle va.

Lexercice était pourtant difficile : contrairement à dautres jeux-vidéo adaptés à la télévision ou au cinéma, ceux de la franchise Fallout sont des jeux ouverts, où le joueur peut adopter différentes positions au fil de ses parties. Dans les jeux, cela se traduit par un potentiel de rejouabilité immense. Dans un film ou une série, cela demande de limagination, tout en restant dans ce quun joueur trouverait plausible pendant ses sessions de jeu. Il sagit dinviter les joueurs habituels dans une histoire quils nont pas encore vécue, tout en espérant attirer les profanes.

Je me situe personnellement entre les deux : jai joué à plusieurs jeux de la franchise, mais pas suffisamment pour en connaître tous les secrets. Disons que jai une petite culture.

Je découvre alors avec enthousiasme une nouvelle histoire, telle quelle pourrait lêtre si je démarrais une nouvelle partie, tout en retrouvant des éléments clichés de la saga qui montrent lindéniable et rassurante parenté. Des éléments aussi divers que le Pip-boy, les affiches avec sa mascotte au pouce levé, les tenues des citoyens des abris, les stim-packs, le Nuka Cola, les capsules, etc.

De même, la progression de lhistoire est, elle-aussi, rassurante, parce que cohérente avec les jeux. Cette cohérence est vraiment importante pour les fans, sans toutefois alourdir le tempo pour les profanes. Chaque épisode a beau être chargé dévènements et ne provoque jamais lennui, il ne fait pas avancer lhistoire trop vite. Juste ce quil faut de progression.

On appréciera aussi lhumour — un peu particulier — propre à la saga, dosé juste comme il faut. Ce nest pas une série comique, mais le comique de situation permet de dédramatiser les moments les plus sombres, afin de garder le spectateur dans une certaine zone de confort. Nous sommes loin, très loin du macabre de The Walking Dead, grâce à ces pointes dhumour, mais aussi grâce à la présence lumineuse dElla Purnell, porteuse despoir et de combativité en toutes circonstances.

Photographie

Là encore, léquilibre est maintenu. Le monde qui nous est présenté fourmille de détails qui sauteront aux yeux des fans, malgré la vastitude des Terres désolées. Les étendues désertiques nous transmettent encore cette impression de beauté terrifiante, sauvage et hostile, magnifiques et dévastées. Les ruines sont nombreuses, détaillées, et font des décors convaincants. Les intérieurs sont brillamment empruntés à la franchise vidéoludique, donnant ce sentiment mêlé de déjà-vu en “tas de pixels” mais cette fois “pour de vrai”, créant de fait une véritable immersion du spectateur/joueur.

Laspect visuel de lensemble de la série est pile là où on le voulait. Cest radioactif, sale, malsain, flippant, mais pas seulement : parfois, locre morne du désert est interrompu par un magnifique lac bleu-vert enveloppé de forêt, ou par une gigantesque plage parfaitement lisse bordant un océan bleu profond.

Mais, rien nest jamais vraiment vide dans Fallout. Notre regard est constamment trompé, nous faisant plonger dans de nouveaux vertiges de solitude, avant de nous confiner jusquà lauthentique claustrophobie dune caverne habitée, ou dans la plus pure agoraphobie, précisément au milieu de marchés surpeuplés. La Vie a beau ne plus être ce quelle était, elle reste néanmoins partout.

Encore une histoire déquilibre : la science dalterner le contemplatif et loppressant est maîtrisée dans cette adaptation, et cest un régal pour les yeux autant que pour les tripes.

Son et musique

Les bruitages sont irréprochables. Le volume sonore employé est satisfaisant, limmersion audio est complète. Les jeux de silences ne sont pas oubliés après la toute première scène, et cest avec évidence quils serviront aux montées dangoisse au fil des épisodes.

Mais, cest véritablement la musique qui orchestre le ressenti du spectateur. Jadore ces scènes de carnage sur des thèmes inhabituels, ici de la country, désacralisant la violence, permettant même de lignorer visuellement et de ne laisser place quà la suggestion, avec en plus, une pointe dhumour.

Là encore, cest un carton plein. Il faut dire que cest Ramin Djawadi qui pilote la musique : on lui doit aussi celle de Game of Thrones ou Pacific Rim, entre autres petites choses.

Conclusion

Jai passé lintégralité du premier épisode les yeux et la bouche grands ouverts. Et, je dois me réfréner à la fin de chaque épisode pour ne pas regarder le suivant. Je veux savourer les neuf épisodes de cette série autant que possible, ignorant si et quand une nouvelle saison va débarquer.

En outre, elle moffre de nouvelles perspectives concernant ma façon de jouer aux jeux Fallout, et il se pourrait bien que je my remette à loccasion.

En un mot : la série est, pour lheure en tout cas, calibrée au millimètre. Il me tarde den voir plus, et, aussi surprenant que ça puisse paraître venant de moi, je nen voudrais à personne si nous avions quelques saisons à se mettre sous la dent…